La doctrine de l’Écriture : une introduction

La Bible occupe une place de choix dans la foi et la spiritualité chrétienne. Mais qu’est-ce que la Bible ? La doctrine de l’Écriture : une introduction répond à cette question avec profondeur tout en demeurant accessible à un lectorat non initié. 

« Prendre sérieusement la Bible, c’est prendre sérieusement Jésus. »

Dans son introduction, Thompson présente trois maillons pour une doctrine de l’Écriture chrétienne. Il commence par placer la personne de Jésus et son évangile au centre de son entreprise. Le chrétien doit adopter la même attitude que Jésus vis-à-vis de l’Écriture. Cela conduit au deuxième maillon, à savoir l’autorité suprême de l’Écriture, se basant sur la personne et l’exemple de Jésus. C’est lui qui l’a authentifiée (pour l’Ancien Testament) et commissionnée (pour le Nouveau Testament). Ainsi, « prendre sérieusement la Bible, c’est prendre sérieusement Jésus » (22). Une doctrine de l’Écriture chrétienne se doit donc d’être bâtie sur l’Écriture elle-même comme autorité suprême. Un argument circulaire ? Thompson montre que cela n’est pas un problème en soi (25f.). Il vient ajouter un dernier maillon à son argumentation. Jésus est le Fils éternel du Père qui vient dans la puissance de l’Esprit-Saint pour révéler Dieu. Si la doctrine de l’Écriture se doit d’avoir Christ au centre et la Bible comme autorité suprême, elle doit trouver « sa base ultime dans l’être et l’activité du Dieu trinitaire » (30). Voilà pourquoi le cœur de ce livre consiste en « un compte-rendu théologique de l’Écriture, qui la relie en chaque point à la personne et au caractère du Dieu qui l’a donnée » (15).

Dans son premier chapitre, « Jésus et l’Écriture », Thompson explore ce que Jésus nous apprend sur la nature et les attributs de l’Écriture à partir de son ministère terrestre. Jésus étant la révélation suprême de Dieu, la question de son attitude vis-à-vis de l’Écriture est de la plus haute importance. Thompson démontre à partir des évangiles que, pour Jésus, l’Écriture est l’autorité finale, la Parole de Dieu tout en étant apportée par des hommes, intelligible, vraie, suffisante et efficace. Cela s’applique non seulement à l’Ancien Testament, mais également à la parole des apôtres commissionnés par Christ. Jésus, en tant que personne qui culmine au centre de l’Écriture comme son accomplissement, est celui qui ancre la fiabilité de l’Écriture. 

Thompson consacre le second chapitre au phénomène de la parole de Dieu. Comment Dieu, qui est esprit, peut-il parler ? Dieu est un « être communicatif », engagé à communiquer (66). Cela s’exprime éternellement dans les relations intra-trinitaires (68). La communication n’est fondamentalement pas étrangère à Dieu. Il n’est donc pas surprenant qu’il communique (et se communique !) à ses créatures (70). Cette communication avec ses créatures implique une forme d’accommodation : Dieu parle avec des mots que nous pouvons comprendre ! Thompson montre ensuite la progression dans la révélation divine. D’abord au travers des prophètes, avec Moïse comme paradigme (Deut. 18.18-20), jusqu’à sa culmination en Jésus Christ, le Verbe incarné. Thompson inclut ici une discussion éclairante sur les modes d’inspiration et le Saint-Esprit. La diction, bien que présente (Ex. 34.27-28), n’est pas le mode le plus fréquent et n’est pas nécessaire pour sauvegarder l’intégrité de l’inspiration divine. Une bonne compréhension du concursus divin et de l’œuvre de l’Esprit rend fidèlement compte du phénomène révélatoire. Thompson conclut : « Dans la communication de Dieu, il n’y a pas d’écart entre qui il est et ce qu’il exprime à propos de lui-même, entre ce qu’il a l’intention de communiquer et ce qu’il communique dans les faits » (85). Il ne s’agit pas de diviniser la Bible, mais de reconnaître qu’il s’agit de plus qu’un véhicule d’information, mais d’un « instrument au service d’une relation » avec le Dieu vivant (86). 

« L’église reconnaît le canon ; elle ne le crée pas. »

Comment est-on passé de la parole parlée par Dieu à une parole écrite ? C’est l’objet du chapitre 3. À partir de l’Exode, Thompson souligne que l’inscripturation de sa parole a été commandée par Dieu lui-même (Ex. 24.3-4). La nation d’Israël s’est développée avec le concept d’un canon dès son origine (91). Canon qui n’était pas simplement pour la première génération, mais pour les générations suivantes également (92). Cette parole écrite est un « artéfact historique » (98). La variété d’auteurs et de contextes historiques ne compromet en rien le fait que ces mots sont bien parole de Dieu. Thompson introduit et défend ici les notions d’inspiration verbale et d’inspiration plénière. L’inspiration verbale signifie que les mots et l’ordre des mots eux-mêmes sont inspirés par Dieu, et pas seulement l’idée derrière ces mots. Cela s’applique bien sûr aux langues originales, bien que Thompson démontre que traduction n’implique pas nécessairement corruption (103).  L’inspiration plénière signifie que l’ensemble de l’Écriture est pleinement inspirée. Il n’y a pas de degrés variables d’inspiration (de canon dans le canon), ni de parties non inspirées. L’ensemble est parole de Dieu. Cela mène Thompson à une discussion succincte sur la formation du canon où il défend que le canon « est une réalité théologique avant d’être une réalité historique » (110). De façon théologique et historique, il n’a pas son origine dans une décision humaine. « L’église reconnaît le canon ; elle ne le crée pas. » (113)

Dans la dernière partie de son livre, Thompson présente quatre attributs de l’Écriture : la clarté, la véracité, la suffisance et l’efficacité. Ceux-ci sont attribués à l’Écriture parce qu’elle est parole de Dieu. Ils trouvent leur origine dans le caractère même de Dieu : sa bénévolence, sa puissance, sa pureté morale (Dieu de vérité qui ne peut pas mentir). Ancré à la fois dans le texte (avec des versets clés), dans le ministère de Jésus, et dans le caractère de Dieu, son traitement de ces attributs est très convaincant. Il prend soin de bien définir les termes et de poser les limites nécessaires en lien avec la raison d’être de l’Écriture (ex : la Bible n’est pas suffisante pour apprendre à cuisiner…). Sa conclusion vaut la peine d’être citée dans son entièreté :

« Le caractère de la parole de Dieu écrite, affirmé ou assumé par Jésus, attesté au travers de l’Ancien et du Nouveau Testament, est inextricablement lié au caractère de Dieu. L’évangile de Jésus Christ tourne toujours ultimement notre attention vers la personne et les desseins du Dieu trinitaire. Le Dieu qui nous a donné sa parole, au travers de l’agentivité (« agency ») humaine véritable des prophètes et des apôtres, est un communicateur efficace. Il est complètement et toujours véritable et sincère. Il n’est jamais ignorant et ne se trompe jamais, et il ne peut mentir. Il pourvoit abondamment pour ses créatures humaines, les objets de son amour. Et sa parole accomplit toujours les desseins pour lesquels elle a été donnée. » (179)

Thompson termine son ouvrage avec un court chapitre nous invitant à une certaine posture dans notre lecture et étude de la Bible. Une posture à la fois d’humilité et de rigueur intellectuelle, avec la conscience aiguë d’être en la présence de Dieu et redevable envers lui pour la façon dont nous y répondons (183). Mais également une posture de joie et de plaisir. La Bible n’est pas un fardeau, mais « la source d’une joie profonde, riche, et retentissante » (184).

La doctrine de l’Écriture : une introduction est un ouvrage d’une très grande qualité. Il traite de manière synthétique tous les aspects clés de cette doctrine sans rester superficiel. Ses arguments sont bien développés, faciles à suivre, agréables à lire. Ils sont étayés de façon robuste par une exégèse saine, sensible à la théologie biblique, et enrichis par de multiples références à des débats et des théologiens, principalement de la période moderne (de la réforme à aujourd’hui).  Bien que son sujet central soit l’Écriture, son accent sur la personne de Jésus et le caractère de Dieu en fait un livre propre à nourrir notre adoration. Loin d’être un manuel insipide de doctrine, ce livre saura vous émerveiller de la générosité de Dieu dans le don de sa parole et renouveler en vous un désir de lire la Bible.

Bref, un superbe ouvrage pour introduire la doctrine de l’Écriture qui saura être bénéfique à la fois à l’étudiant en théologie, au pasteur, et à tout chrétien (pourvu qu’il lise l’anglais !).

Thompson, Mark. The Doctrine of Scripture: An Introduction. Short Studies in Systematic Theology. Wheaton, Illinois: Crossway, 2022. Non Traduit

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